Par Simon Brandt

Alors que la Ville de Genève présentait hier ses comptes 2014 (voir ici), souvenons-nous que depuis deux ans, la municipalité s’enfonce dans les profondeurs du classement des Villes les mieux gérées de Suisse. Aujourd’hui, sur la base des comptes 2013, la Ville de Genève arrive à la dernière place du classement, et il n’est de loin pas certain que les comptes 2014 permettront de remonter dans le classement de l’année prochaine.

En effet, si la dernière place au classement est surtout due à la recapitalisation de la Caisse de Prévoyance (CAP), il convient cependant de rappeler que cela a été un choix politique de ne pas faire des économies équivalentes. On ne peut donc que s’inquiéter pour la notation des années à venir avec une municipalité qui maîtrise mal ses dépenses et voit, cette année, sa dette augmenter.

Ainsi, en début d’année, l’IDHEAP (Institut des Hautes Études en Administration Publique) a publié le classement des villes les mieux gérées de Suisse, qui se fait cette fois sur la base des comptes 2013. Ledit classement consistant en une analyse de leur santé financière, en distribuant les bons et les mauvais points, donnant quitus ou non à la gestion desdites collectivités via une méthodologie commune. Le tout relayé par PME Magazine dans son édition de janvier 2015 (voir ici l’analyse détaillée de l’IDHEAP sur le sujet).

Comme l’année précédente, qui avait vu la Ville de Genève chuter au classement (voir ma note de l’année dernière ici), aucune communication pompeuse de la municipalité suite à ce nouveau comparatif  Et une magistrate en charge des finances, en la personne de Sandrine Salerno, qui se fait bien discrète sur le sujet. Ce qui n’a pourtant pas toujours été le cas, pour preuve la déclaration faite en 2012 sur son blog que vous trouverez ici.

La raison en est toute simple, pour la seconde année consécutive, la Ville de Genève s’est effondrée au classement en passant de la quatorzième à la dix-neuvième place (soit la dernière du classement) le tout avec une note qui passe de 3.80 à 3.54 sur 6, alors même qu’elle était à 5.58 il y a deux ans. Soit une dégradation de la note de près de 33% et un recul de 17 places, sachant que la Ville de Genève était seconde au classement sur les comptes de 2011, et même première sur ceux de 2010. Ce qui fait dire à PME Magasine que le plongeon de la Ville de Genève touche au pathétique.

Exit donc l’image faussée de bonne gestion financière de la commune et bienvenue dans la réalité avec une municipalité dispendieuse qui voit la majorité de gauche, du Conseil Administratif, préférer le clientélisme des dépenses inutiles plutôt que le développement durable qui voudrait que l’on cesse de vivre à crédit sur les générations futures. Entre l’exercice comptable de 2012 et celui de 2013, PME magazine souligne ainsi qu’il a manqué 3% de recettes pour financer les charges courantes avec, comme corollaire, une dette qui s’est accrue de 4.5%. Concluant ensuite que cela n’a rien d’étonnant avec des dépenses qui ont augmentés de 12% dans le même laps de temps.

De plus, sur les huit indicateurs qui composent la note de l’IDEHAP, deux ne doivent pas être pris au pied de la lettre pour mesurer la santé financière de la Ville de Genève. En effet, ce classement note le degré d’exactitude de la prévision fiscale et la maîtrise des charges alors même que, dans le cas d’une commune genevoise, une municipalité a une marge de manœuvre extrêmement faible sur le sujet. En effet, dans le premier cas, la loi sur l’administration des communes (LAC) interdit pour une commune d’avoir un déficit (il est donc normal que la Ville soit bien notée vu qu’elle ne fait que respecter la loi) et elle ne fait que copier-coller les prévisions fiscales du canton dans le second.

La notation de la Ville devrait donc être encore plus faible étant donné que les deux indicateurs susnommés ne dépendent pas directement de cette dernière, mais bien du canton de Genève. Ils remontent donc artificiellement la mauvaise note de la municipalité. A l’inverse, je le répète une seconde fois, il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que la recapitalisation de la CAP a largement tiré la notation de la municipalité vers le bas, même si cela a été une décision politique que de ne pas faire des économies équivalentes pour équilibrer les comptes.

Actuellement, faute de faire les choix nécessaires, la Ville de Genève vit à crédit sur ses dépenses d’investissement et continue, chaque année, à charger la barque des dépenses de fonctionnement. Une hausse des recettes fiscales sera ainsi systématiquement accompagnée d’une hausse des dépenses, il serait en effet absurde (dans la logique de l’Alternative) de ne pas dépenser jusqu’au dernier franc l’argent que l’on a à disposition. On poussera même le vice à dire que l’on n’aime pas le monde de la finance, des multinationales et de tout ce qui rapporte de l’argent ; mais on sera par contre bien content que ces mêmes sociétés contribuent au budget municipal via l’imposition.

Alors que chaque fois que sa gestion financière était bien notée, la conseillère administrative Sandrine Salerno communiquait à corps et à cri pour montrer qu’elle gérait bien les finances publiques, on aimerait bien l’entendre, avec la même célérité, pour expliquer la mauvaise note que la municipalité reçoit à nouveau cette année. Ou bien se murera-t-elle dans le silence pour la seconde année consécutive faute de pouvoir expliquer les raisons de ce plongeon ? Il est vrai qu’il est plus facile de dire qu’on se battra contre toute baisse de la fiscalité, respectivement de se plaindre que la Ville de Genève ne touche pas assez dans la péréquation intercommunale, que de s’expliquer sur sa mauvaise gestion. Car si tout allait bien, comment expliquer l’effondrement de la municipalité dans ce classement des Villes les mieux gérées de Suisse?

L’article fut initialement publié à cette adresse : http://simonbrandt.blog.tdg.ch/archive/2015/04/02/finances-publiques-le-krash-de-la-ville-de-geneve-266010.html